Il y a 978ans de cela, la Maison Oblodra régnait en maître sur Maer Dualgon. Au milieu de cette cité de sorciers, assujettis aux règles régissant la magie, les prêtresses psionistes de la première Maison comptaient parmi les plus puissantes qui soient. Ce fut au départ une grande déception pour la Mère Matrone et ses filles de voir naître un mâle, être incapable de se plier à la discipline nécessaire à la pratique de cet art si secret que, à leur connaissance, seule leur famille savait pratiquer. Cependant, malgré tous les prétextes offerts par Lloth de sacrifier un enfant nouveau-né, le fait qu'il soit un mâle, et pas le troisième fils vivant de la famille, ne suffisait pas à justifier ce geste, en égard à la Déesse.
L'enfant fut donc confié à la plus jeune de ses sœurs, d'un siècle son ainée, qui, si elle parvint dans ses premières années à lui inculquer la soumission que tout mâle se doit de respecter face à une Drow, eut rapidement à composer avec le caractère difficile du jeune mâle. Impétueux, colérique et foncièrement mauvais, Cana'as n'avait pas deux décennies qu'il promettait déjà d'être aussi dangereux que peuvent l'être ses pairs. Il n'y aurai pas à briser la conscience d'un être qui n'en a jamais eu.
A 20 ans, comme tout jeune Drow mâle, il passa du statut de page (comprenez serviteur dévoué au ménage de la demeure) de la Maison à celui de prince, fils de la Mère Matrone. Avec le maître d'armes de la Maison, il apprit tout ce qu'il y avait à savoir du combat, et fit sa spécialité du combat à deux lames longues recourbées. Avec ses soeurs, il apprit tout ce qu'il y avait à savoir du psionisme, et si au départ il fut un élève lamentable, trop impulsif et impatient pour parvenir à se concentrer suffisamment pour obtenir le plus misérable résultat, il finit par faire ses preuves, même s'il lui fallut près de cinq décennies pour cela. Cinq décennies durant lesquelles, s'il parvint à contenir cette folie profonde qui l'habitait pour se montrer à la hauteur des espérances de sa mère, il ne put jamais faire taire cette soif de sang qui était en lui depuis toujours.
Contrairement à la majorité des drows mâles de la cité, il ne connu ni l'Académie de sorcellerie, ni l'école de combat, ayant bien assez de professeurs à domicile en les personnes de ses sœurs et son maitre d'armes. De plus, sa mère tenait à garder pour elle l'avantage tactique que pouvait représenter un Drow psioniste, mais également un tueur né, qui passa sans l'ombre d'un remord l'épreuve de son premier meurtre drow, à la limite qu'il était d'en redemander, là où un bon quart des jeunes drows ont besoin d'être brisés dans leur âme et conscience pour devenir aussi brillants que leurs ainés.
Jusqu'à ses 219ans, sa vie ne se différencia guère de la vie d'un autre Drow, hormis, sans doute, qu'il obtint, de par sa capacité à contrôler ses pouvoirs et la facilité avec laquelle il s'est fait une place dans le monde drow, une place suffisamment importante dans sa famille pour qu'il n'ait pas à se sentir particulièrement inférieur à ses sœurs. Une autre différence fondamentale fut le détachement progressif de la Mère Matrone envers la Reine Araignée, détachement qui causa finalement la perte de la demeure.
Cela commença par une sensation de vide dans l'esprit des prêtresses, constamment liées à leur déesse qui les abandonna soudain. Pour nombre de gens, cela ne représente pas grand chose, mais pour des prêtresses drows averties, c'est un signe à ne pas prendre à la légère, et l'alerte eut tôt fait d'être donnée. Le temps, pourtant court, que les soldats se mettent en place et que les nobles utilisent leurs pouvoirs pour protéger la demeure, les foudres magiques frappaient déjà, et le flot quasi continu d'éclairs magiques et autres sphères d'espace temps finirent par avoir raison des troupes, puis des psionistes les plus faibles, perdant peut à peu leur concentration et ayant de loin dépassé le maximum de leurs capacités. Piégé, blessé et voyant les siens tomber les uns après les autres autour de lui, c'est ce jour là que le Drow découvrit deux choses : l'instinct de survie et la lâcheté. Sans doute se ferait-il tuer si, après le conflit, l'une ou l'autre des grandes prêtresses de sa Maison venait à le retrouver, mais il doutait fortement que l'une d'entre elles sorte vivante de ce conflit. Doute avéré comme, des hauteurs de la cité, il ne put qu'observer tomber les derniers vestiges de ce qui fut sa Maison.
Il y a 722ans de cela, sa route l'amena à la surface où il participa activement aux conflits s'y passant. Toujours de son propre coté, jamais de celui des bons, sa haine innée des elfes et des nains a choisi son camp pour lui. C'est ainsi qu'il y a un peu plus de 700ans, il s'est retrouvé allié à Glindra, et s'il pensait cette alliance temporaire - après tout, tout non Drow est un être inférieur -, il s'avère que la puissance et la douce folie de la sorcière lui ont suffisamment convenu pour que, même dans sa défaite, il la suive. S'il profita des premiers siècles pour se perfectionner, aussi bien dans le psionisme que dans le combat, avec toutes sortes de lames, il n'était jamais le dernier pour un raid ou un autre sur le continent, se complaisant à abattre des elfes de sang froid. Il y a 250ans de cela, il attaqua cependant la mauvaise elfe, et ne dut qu'à son instinct de survie doublé d'un formidable coup de chance d'avoir eu juste le temps de déployer un bouclier autour de lui avant de disparaitre grâce à l'un des nombreux tours de Glindra. Cependant, il en subit tout de même les conséquences, comme son visage fut grièvement brulé, blessure dont il mit plusieurs mois à se remettre, bien que la cicatrice en reste parfaitement visible plus de deux siècles plus tard.
Suite à cela, il a tendance à se montrer plus raisonnable et éviter tout risque de recroiser "l'elfe au dragon". Plus qu'une crainte, un rappel que, Drow ou pas, il n'est pas immortel. Parlant d'immortalité, il est à noter que seule Glindra est responsable de son exceptionnelle longévité, pour une race dont les représentants mâles ont une espérance de vie moyenne d'un maximum de 600/700ans. Aujourd'hui, il se prend au nouveau jeu de Glindra, ces enlèvements d'enfants de tous âges et de toutes races, même si ses préférés sont les plus âgés... Eux seuls ont tendance à chercher à lui résister, et il aime à relever le défi. Il a d'ailleurs le souvenir d'une saloperie de fils d'humain avec lequel il en a particulièrement bavé...même s'il n'est pas prêt de l'avouer.